Mars 2024
Vicat est un cimentier français dont la capitalisation boursière est de l’ordre de 1,6 Mds € et dont l’actionnariat est familial. Nous résumons un webinaire organisé par Nicolas Haese, analyste ESG chez CIC Market Solutions, que nous remercions. Vicat était représenté par Eric Bourdon, Directeur Général Adjoint et Chief Climate Officer, que nous remercions également.
La perspective de décarbonation de Vicat démontre que la transition est et sera une réalité dans les années qui viennent, que c’est un processus exigeant, qui peut avoir des impacts significatifs sur les investissements et les business models.
Quelques ordres de grandeur pour commencer. Le ciment représente environ 5-7% des émissions mondiales de CO2, 4% en Europe, moins de 2% en France. A l’avenir, la demande de ciment va continuer à augmenter dans les pays émergents, alors que l’empreinte carbone du secteur en Europe et aux Etats-Unis devrait baisser.
Un rappel des principes ensuite. Plus de 60% des émissions de CO2 proviennent de la réaction chimique de décarbonatation du calcaire pour obtenir du ciment (CaCO3 → CaO + CO2). Les 40% restants proviennent essentiellement de la combustion pour obtenir une chaleur suffisante permettant cette réaction chimique.
Il existe 4 voies de décarbonation sur lesquelles Vicat s’est engagée à des degrés divers :
- Trois technologies en cours de déploiement.
- Efficacité énergétique et de chaleur, ce qui peut nécessiter des changements d’installation ;
- Diminution du taux de clinker dans le ciment ;
- Substitution d’énergies fossiles par des énergies alternatives, notamment de la biomasse. Vicat aura substitué 100% des énergies fossiles en France et en Suisse d’ici 2030.
Les objectifs de décarbonation de la société à 2030 ne s’appuient que sur ces trois technologies, dont Vicat maitrise les coûts. Cela permet d’envisager au global 497 kg de CO2 / tonne de ciment. En Suisse, ce ratio est même déjà inférieur à 400 kg CO2 / tonne de ciment.
- La quatrième technologie envisagée, qui pourra encore améliorer l’empreinte carbone de Vicat, est la capture et le stockage du carbone.
- Si la technologie existe, les investissements sont très coûteux, ils conduisent à plus que doubler le prix de la tonne de ciment. En effet, il y a la capture puis le stockage, voire l’utilisation du CO2 récupéré (pour faire du méthanol par exemple), ce qui nécessite des installations industrielles parfois plus importantes que les cimenteries elles-mêmes. A ce jour, ce surcoût de l’ordre de 150-200 € / tonne de CO2 capturée n’est pas économique, le crédit carbone pour une tonne de CO2 s’échangeant aux alentours de 60 € / tonne.
- Toutefois, Vicat développe des premiers projets de ce type en France et en Californie.
- Le succès de ces technologies dépendra de leur montée en puissance à l’échelle industrielle, de l’évolution des réglementations et de l’acceptabilité par le marché de la prime des ciments bas carbone.
- Leur déploiement plus rapide nécessiterait sans doute des aides publiques, européennes et nationales.
En plus de ces technologies, Vicat développe des initiatives pour contribuer à la neutralité carbone sur l’ensemble de la chaine de valeur sur ses territoires d’implantation. La société mène de nombreuses actions même si elles ne répondent pas à des pressions réglementaires ou à l’amélioration de ratios spécifiques.
- Par exemple, une unité de production à Chambéry est spécialisée dans l’impression 3D béton, qui permet de diviser par deux la quantité de béton nécessaire à la construction d’une maison.
- Autre exemple, une filiale comme « Circulaire France » se spécialise sur la démolition et le recyclage des déchets du secteur de la construction.
- Vicat est également connue pour son béton « carbone négatif » CARAT. Au total, des efforts de décarbonation sont réalisés sur l’ensemble de l’offre produits.
Au-delà des convictions des actionnaires et des dirigeants, la transition de Vicat répond à trois tendances lourdes :
- La réglementation dans certains pays comme la France où un cadre strict a été mis en place pour réduire les émissions de CO2 dans l’industrie ;
- La réglementation et les normes européennes (Taxonomie, ETS, etc.) vont dans le même sens ;
- La finance exerce une pression significative pour la décarbonation, aussi bien pour Vicat que pour ses clients.
Enfin, Eric Bourdon rappelle que Vicat a conservé ses crédits carbone, qui ont une valeur de marché de plus de 300 M€ à ce jour, et qui pourront permettre de financer des projets à l’avenir.
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